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Publié le mercredi 20 mai 2020 à 18:00:00
Lettre du Président de Sauvons Notre Futur aux Adhérents (20 mai 2020)

Bonjour à toutes et tous,

 

La crise sanitaire que nous vivons met en lumière les défauts de la politique actuelle dans beaucoup de domaines. Cette période exceptionnelle touchant le monde entier, nous pourrions espérer de profonds changements. Je crains que la puissance des lobbies financiers et économiques fasse tout pour que rien ne change. Au contraire, la tentation sera grande de récupérer les profits perdus et conforter la suprématie de l’idéologie néolibérale en dépit des dégâts qu’elle cause sur l’environnement (entre autres).

 

Quelques anomalies :

► La santé : La crise actuelle a révélé la valeur et le dévouement du personnel soignant. Leurs conditions de travail se dégradent depuis des années avec des réductions de budget récurrentes, avec des Agences Régionales de Santé (créées en 2010) dont le but est de « mieux répondre aux besoins de la population et d’accroitre l’efficacité du système », en langage clair : faire des économies. L’ARS du Grand Est emploie plus de 800 personnes et en pleine crise du Covid19, son Directeur a annoncé son intention de continuer à supprimer des lits d’hôpitaux ! Cette maladresse lui vaudra peut-être une place dans un placard doré ! Dans la pure tradition de la haute fonction publique, l’excès de bureaucratie complique encore plus le fonctionnement de notre système de santé.

 

► L’industrie : Le manque de masques, de matériel dans les hôpitaux, de certains médicaments et de bien d’autres produits de consommation révèle notre dépendance et les dégâts de la désindustrialisation en vogue depuis plus de trente ans. Je me souviens du discours d’économistes très écoutés : « l’avenir de la France, ce sont les services, l’industrie c’est dépassé ». Nos grandes industries nationales ont été bradées, nous avons perdu des compétences. Nos politiques sont fiers lorsque les capitaux étrangers arrivent dans notre pays, mais à quel prix ? : Des fonds de pension souvent anglo-saxons achètent et exploitent des entreprises et pour plus de rentabilité ils baissent les coûts, les investissements, la recherche et laissent ces entreprises s’écrouler. Alors, réindustrialiser ? : Sans aucun doute mais à condition que cela soit fait d’une façon exemplaire au niveau environnemental, que l’État arrête de réduire les contraintes, de faire disparaitre les enquêtes publiques et de détruire le droit de l’environnement. D’après des déclarations récentes de la Commission européenne, nous ne serons guère soutenus par l’Europe qui persiste dans la voie de l’économie de marché et qui souhaite que les aides apportées par les états pour une reprise après la crise sanitaire n’engendrent pas de « distorsions de concurrence ».

 

► L’agriculture :

D’abord quelques chiffres : La moitié des fruits et légumes consommés en France est importée ainsi que le tiers des volailles et des produits bio. 800 000 hectares de terres cultivées disparaissent tous les 10 ans, plus de la moitié étant artificialisée. 200 à 300 agriculteurs se suicident chaque année et le tiers des survivants partira à la retraite d’ici 2030.

Nous étions fiers de notre agriculture et de notre gastronomie, de notre alimentation grâce à la variété, à la qualité de nos produits et à notre cuisine traditionnelle. Aujourd’hui, avec les fastfoods (40 milliards de chiffre d’affaires) et la nourriture industrielle, 30% des Français seraient en surpoids et 10% obèses. Chez les moins de 15 ans, 3% étaient en surpoids en 1965, aujourd’hui ils sont 18% dont 3% obèses : on est bien loin du fameux « paradoxe français ».

Au mois d’avril dernier, le Président de la République a donné son avis : « il faut rebâtir une agriculture industrielle et technologique » ; cet homme-là ne connaît sans doute rien à l’agriculture et doit être très courtisé par les puissants lobbies de l’agro-industrie, de la grande distribution, de l’agro-alimentaire et de la FNSEA(1) (n’oublions pas que le précédent Président de ce syndicat estimait que l’exploitant d’une ferme avec moins de 50 vaches ne pouvait pas être considéré comme un agriculteur).

Pour la technologie, c’est à étudier, il y a peut-être des avantages à exploiter. Par contre, pour moi, « industrielle » est un qualificatif incompatible avec « agriculture ».

 

Je ne suis pas un expert, mais ayant travaillé plusieurs décennies dans l’agriculture, je vous fais part de quelques réflexions personnelles :

  • Il faudrait refondre totalement la loi « EGalim(2) » qui devait être favorable au revenu des agriculteurs : c’est un échec complet sur ce plan.
  • La nouvelle PAC(3) pour la période 2021-2027 est en cours de discussion au niveau européen. Il semblerait que chaque État aurait plus de liberté pour gérer et distribuer cette aide qui sera de toute façon en diminution. Il faudrait arrêter de lier les montants à la surface cultivée mais plutôt assurer un revenu décent aux exploitants, en particulier pour les petites structures et les productions n’assurant pas un revenu suffisant (production laitière par exemple). Réintroduire les systèmes de quotas.
  • Il était prévu que la consommation de pesticides diminue, ce n’est pas le cas, elle a même fortement progressé en 2019. L’utilisation des pesticides pourrait baisser de 25% sans que la production soit significativement impactée. L’importation de produits pour lesquels des produits phytos non autorisés en France ont été utilisés doit être interdite. Les accords de libre-échange (Canada, USA, Brésil, etc.) très en vogue actuellement devraient exclure les produits agricoles, car on nous dit qu’ils seraient contrôlés à l’entrée. Or nous n’avons déjà pas suffisamment de personnel (et on en supprime régulièrement) pour contrôler efficacement ce qui devrait l’être dans notre pays : ICPE(4), contrôles sanitaires, travail, etc. Il est aberrant de transporter ces produits sur des milliers de kilomètres en bateau ou en avion, alors que l’on constate l’intérêt des circuits courts.
  • Pour une agriculture plus équilibrée, y compris sur le plan agronomique, l’idéal serait de garder un modèle de polyculture/élevage. Beaucoup de sols en agriculture intensive sont fortement dégradés : le passage au Bio montre que ce n’est pas irréversible. La terre ne devrait plus être qu’un simple support mais un milieu vivant permettant une production de bonne qualité nutritionnelle.

 

Il y aurait encore beaucoup à dire, comme la destruction complète de certains milieux pour produire en quantité des intrants nécessaires à l’agriculture industrielle et à l’alimentation industrielle (soja, huile de palme…) ou encore comme l’hégémonie des grands groupes de semenciers, etc.

 

Bien à vous.

 

Sablons, le mercredi 20 mai 2020.

 

Le Président,

Jean-Claude Girardin

 

 

(1) FNSEA : Fondée en 1946, la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles premier syndicat agricole français, rassemble l’ensemble des productions de toutes les régions.

(2) EGalim : La loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable a été promulguée le 1er novembre 2018.

(3) PAC : Politique Agricole Commune

(4) ICPE : Installation Classée pour la Protection de l'Environnement

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